Comment appelle-t-on celui qui dit une chose et son contraire ?

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On appelle énantiosème celui qui dit une chose et son contraire. Ce terme, forgé par Linda Giguère, associe le grec énantios (opposé) et sèmes (signe linguistique).
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L’Énantiosème : celui qui parle en contradictions

Nous sommes constamment confrontés à des discours ambigus, à des affirmations contradictoires qui brouillent les pistes et rendent la compréhension difficile. Mais comment qualifier précisément celui qui, consciemment ou non, profère une chose et son contraire ? Si le langage courant recourt à des termes imprécis comme “menteur”, “hypocrite” ou “ambigu”, une linguiste canadienne, Linda Giguère, a forgé un néologisme plus précis et élégant : l’énantiosème.

Le terme “énantiosème”, issu de la combinaison du grec ancien “énantios” (opposé, contraire) et de “sème” (unité minimale de signification linguistique), désigne avec une remarquable précision celui qui produit un discours caractérisé par une contradiction interne. Il ne s’agit pas simplement d’un manque de cohérence accidentel, mais d’une véritable juxtaposition délibérée ou inconsciente d’énoncés contradictoires au sein d’un même message.

Contrairement à l’hypocrisie qui implique une intention de tromper, l’énantiosème englobe un spectre plus large de situations. Il peut désigner aussi bien le politique qui promet à la fois la rigueur budgétaire et des augmentations de salaire substantielles, que l’individu qui affirme aimer la nature tout en polluant son environnement sans vergogne. L’énantiosème peut également être le fruit d’un raisonnement incohérent, d’un manque de clarté dans la pensée, ou même d’une tentative inconsciente de se concilier des points de vue opposés.

L’intérêt du néologisme de Linda Giguère réside dans sa capacité à nommer précisément un phénomène linguistique courant, souvent difficile à cerner. Il permet d’analyser de manière plus fine les mécanismes de la communication, en identifiant une forme particulière de contradiction discursive. L’énantiosème n’est pas seulement un simple défaut de langage ; il est révélateur d’un certain rapport au réel, d’une manière particulière de construire le discours et, par conséquent, de se positionner dans le monde.

L’étude de l’énantiosème ouvre des perspectives fascinantes dans le domaine de la linguistique, de la rhétorique et même de la psychologie. Comprendre les mécanismes qui produisent cette forme de contradiction permet de mieux décrypter les discours ambigus et, in fine, de naviguer avec plus d’acuité dans un monde où l’information, souvent contradictoire, est abondante. Le mot “énantiosème” offre donc un outil précieux pour une analyse plus fine et plus nuancée de la complexité de la communication humaine.