Pourquoi un mannequin est-il maigre ?

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Lextrême minceur des mannequins est souvent dictée par les marques. Lobjectif est de présenter les vêtements de manière épurée, se rapprochant le plus possible du design original du créateur. Un corps mince permettrait une meilleure tombée du vêtement, sans être altéré par des formes prononcées, facilitant ainsi la mise en valeur du modèle.

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L’illusion de la toile vierge : pourquoi la maigreur persiste-t-elle dans l’univers des mannequins ?

La silhouette longiligne, presque spectrale, des mannequins continue d’interroger. Si l’on évoque souvent la pression sociale et les diktats de la beauté, l’explication se trouve aussi, et peut-être surtout, du côté des marques et de leur approche de la présentation des vêtements. L’extrême minceur n’est pas (seulement) une quête esthétique, mais un outil marketing, une manière de mettre en avant le vêtement et non le corps qui le porte.

L’idée, consciemment ou non, est de transformer le mannequin en une sorte de “toile vierge” sur laquelle le vêtement peut s’exprimer pleinement. Un corps mince, dépourvu de formes prononcées, est perçu comme une surface neutre, minimisant les “interférences” visuelles et permettant au vêtement de “tomber” de la manière imaginée par le créateur. On recherche l’épure, la ligne pure, non perturbée par les courbes et les volumes d’un corps plus charnu.

Cette approche, bien qu’ancrée dans les pratiques de l’industrie, est paradoxale. En cherchant à sublimer le vêtement, elle le désincarne. Le vêtement, conçu pour être porté, est présenté sur un corps qui s’efface, créant une distance avec la réalité des consommateurs et leurs morphologies diverses. Le vêtement, au lieu d’être mis en valeur par le corps, semble exister indépendamment de lui.

De plus, cette focalisation sur la minceur perpétue une vision restrictive de la beauté, transformant le mannequin en un idéal inaccessible et contribuant à la pression sociale subie par de nombreuses personnes. Si l’argument de la “mise en valeur du vêtement” est avancé, il masque une réalité plus complexe, où les enjeux commerciaux et la perpétuation d’une esthétique uniforme priment sur la diversité et la représentation réaliste des corps. L’industrie de la mode a donc la responsabilité de repenser ses pratiques et de s’interroger sur l’impact de ses choix, non seulement sur l’image qu’elle renvoie, mais aussi sur le bien-être des individus. L’avenir du mannequinat, et plus largement de la mode, réside peut-être dans la capacité à embrasser la diversité des corps et à célébrer la beauté sous toutes ses formes, transformant la “toile vierge” en un tableau vivant et vibrant.