Quand bébé se dissocie de sa maman ?

Le Grand Décollement : Quand bébé prend conscience de sa propre individualité

Vers huit ou neuf mois, une révolution silencieuse s’opère dans le monde intérieur du bébé. Ce n’est plus une simple fusion avec sa mère, un tout indivisible. Une prise de conscience profonde émerge : il existe deux êtres distincts, lui et sa maman. Cette réalisation, aussi fondamentale qu’elle soit pour son développement, est souvent source d’angoisse, marquant une étape cruciale de son développement psychologique et affectif. On parle alors de la constance de l’objet.

Avant cet âge, le bébé perçoit sa mère comme une extension de lui-même. Son absence n’est pas vécue comme une séparation, car il ne possède pas encore la notion de permanence de l’objet. Disparaître de son champ visuel signifie, pour lui, cesser d’exister. Après huit ou neuf mois, cependant, cette perception se modifie radicalement. Il comprend désormais que sa mère continue d’exister même lorsqu’elle n’est pas visible. Cette compréhension, en soi positive, ouvre la voie à de nouvelles émotions, dont l’angoisse de séparation.

Cette angoisse n’est pas une manifestation de caprice ou de manipulation. Elle traduit au contraire une attachement profond et sain à la figure maternelle (ou paternelle). Le bébé, ayant compris son individualité et celle de sa mère, craint la perte de ce lien vital, source de sécurité et de réconfort. La disparition de la mère représente une rupture dans ce sentiment de sécurité nouvellement acquis, générant une réaction émotionnelle intense et souvent exprimée par des pleurs, des cris, une agitation importante ou au contraire un repli sur soi.

Il est important de noter que le moment exact de cette prise de conscience varie d’un enfant à l’autre. Certains bébés peuvent manifester des signes d’angoisse de séparation dès sept mois, tandis que d’autres peuvent atteindre dix mois sans présenter de réactions marquées. De nombreux facteurs influencent ce processus : le tempérament de l’enfant, la qualité de l’attachement parent-enfant, l’environnement familial et les expériences vécues.

L’angoisse de séparation est donc une étape normale et même nécessaire du développement. Elle témoigne d’un attachement sécurisant et d’une maturation cognitive importante. Comprendre ce processus permet aux parents d’accompagner au mieux leur enfant durant cette période, en lui offrant des repères stables, des rituels rassurants et une réponse empathique à ses émotions. Il est crucial de valider ses sentiments sans chercher à les minimiser, lui rappelant constamment son importance et son amour inconditionnel. En gérant cette phase avec patience et bienveillance, les parents favorisent le développement d’un enfant confiant et épanoui.