Dans quelle mesure la campagne 5 fruits et légumes par jour est-elle efficace ?

La Campagne “5 Fruits et Légumes par Jour” : Efficacité en Trompe-l’Oeil ?

Depuis son lancement il y a plus de deux décennies, la campagne “5 fruits et légumes par jour” est devenue un slogan familier, martelé dans les publicités, les écoles et les cabinets médicaux. L’objectif est simple et louable : encourager une consommation accrue de fruits et légumes pour améliorer la santé publique et prévenir les maladies chroniques. Mais au-delà du martelage médiatique, l’efficacité réelle de cette campagne est-elle à la hauteur des ambitions initiales ?

Si l’on se penche sur les chiffres, un constat amer s’impose. La réalité dépeint un tableau bien différent de celui d’une population saine et consommant avidement ses cinq portions quotidiennes. En réalité, seule une fraction de la population atteint cet objectif. On observe des disparités frappantes selon les groupes d’âge : environ un tiers des seniors parvient à respecter les recommandations, un quart des adultes, et un chiffre alarmant de moins de 10% pour les adolescents. La moyenne, elle, oscille entre trois et quatre portions par jour, un écart significatif par rapport à la cible affichée.

Dès lors, on peut légitimement s’interroger sur les raisons de ce décalage. Est-ce un manque d’information, un problème d’accessibilité, ou une simple question de volonté ? La réponse est probablement une combinaison complexe de ces facteurs.

Facteurs d’Obstruction : Un Enchevêtrement de Difficultés

Plusieurs obstacles se dressent sur le chemin d’une consommation accrue de fruits et légumes :

• Accessibilité financière : Les fruits et légumes frais, en particulier les produits biologiques ou locaux, peuvent être onéreux, rendant difficile leur intégration dans les budgets des ménages à faibles revenus.
• Disponibilité : Dans certaines zones rurales ou quartiers défavorisés, l’accès à des magasins proposant une large variété de fruits et légumes frais peut être limité.
• Manque de temps et de compétences culinaires : La préparation des fruits et légumes demande du temps et un minimum de savoir-faire culinaire, des éléments qui peuvent manquer dans des modes de vie trépidants.
• Habitudes alimentaires ancrées : Les habitudes alimentaires sont souvent profondément ancrées et influencées par des facteurs culturels, sociaux et personnels. Changer ces habitudes demande un effort conscient et soutenu.
• Influence du marketing agroalimentaire : Les stratégies marketing agressives des industries agroalimentaires, privilégiant les produits transformés et souvent riches en sucre, sel et graisses, contribuent à détourner les consommateurs des options plus saines.

Au-Delà du Slogan : Repenser l’Approche

Il est clair que la simple répétition d’un slogan ne suffit pas à transformer les habitudes alimentaires. Pour que la campagne “5 fruits et légumes par jour” soit véritablement efficace, une approche plus holistique et ciblée est nécessaire. Cela implique :

• Rendre les fruits et légumes plus abordables : Subventions, aides alimentaires ciblées, initiatives locales visant à réduire les prix des produits frais.
• Améliorer l’accessibilité géographique : Soutenir les marchés de producteurs locaux, favoriser l’implantation de commerces de proximité proposant une offre variée de fruits et légumes.
• Promouvoir l’éducation nutritionnelle : Développer des programmes éducatifs ludiques et adaptés aux différents publics, mettant l’accent sur les bénéfices des fruits et légumes, les techniques de préparation simples et les astuces pour les intégrer facilement dans l’alimentation quotidienne.
• Soutenir les initiatives locales : Encourager les jardins partagés, les ateliers de cuisine collective, et d’autres initiatives favorisant l’appropriation des enjeux liés à l’alimentation.
• Réglementer le marketing agroalimentaire : Limiter la publicité pour les produits ultra-transformés, particulièrement auprès des enfants.

En conclusion, la campagne “5 fruits et légumes par jour” a indéniablement contribué à sensibiliser le public à l’importance d’une alimentation riche en fruits et légumes. Cependant, les chiffres actuels révèlent un fossé important entre les recommandations et les pratiques réelles. Pour combler ce fossé, il est impératif de dépasser le simple slogan et de mettre en œuvre des politiques publiques ambitieuses et cohérentes, visant à rendre les fruits et légumes plus accessibles, abordables et attrayants pour tous. L’avenir de notre santé en dépend.