Est-ce qu'on a le droit de crier ?

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En France, une majorité de parents avoue avoir du mal à élever leurs enfants sans crier, bien que la loi interdise ces pratiques, ainsi que les gestes violents. Afin de lutter contre les violences éducatives ordinaires, une campagne de sensibilisation par le biais dun spot télévisé a débuté en novembre 2021 et se poursuivra pendant deux mois.

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Le cri, un interdit éducatif ? Décryptage de la loi et de la réalité en France.

En France, le murmure de la pédagogie positive tente de faire taire le cri parental. Si l’image idyllique de l’éducation bienveillante s’impose de plus en plus, la réalité est plus nuancée. Une majorité de parents admettent recourir au cri, malgré sa prohibition implicite et la campagne de sensibilisation lancée en novembre 2021 pour lutter contre les violences éducatives ordinaires (VEO). Mais où se situe la frontière entre une manifestation momentanée d’énervement et une pratique abusive ? Peut-on réellement interdire le cri ? Et surtout, quel est son impact sur l’enfant ?

La loi, elle, ne mentionne pas explicitement l’interdiction de crier sur un enfant. Cependant, le Code civil, et plus précisément l’article 226-10, stipule que « nul ne peut porter atteinte à la santé physique ou mentale d’autrui ». Crier, dans certains contextes et avec une certaine intensité, peut être considéré comme une forme de violence psychologique, relevant donc de ce délit. La jurisprudence reste prudente, privilégiant l’analyse du contexte global de l’éducation : la fréquence des cris, leur intensité, le lien avec d’autres comportements violents (physiques ou verbaux), la réaction de l’enfant, la relation parent-enfant… Ainsi, un cri isolé, dans un moment de stress intense, sera différencié d’une pratique habituelle et systématique.

La campagne de sensibilisation, loin de stigmatiser les parents, vise à promouvoir une éducation respectueuse et bienveillante. Elle souligne l’importance de développer des stratégies alternatives à la violence, que ce soit physique ou verbale. L’objectif n’est pas d’ériger les parents en saints parfaits, exempts de toute émotion, mais de les accompagner vers des pratiques éducatives plus saines. Des ressources et des formations sont ainsi mises à disposition pour aider les parents à gérer leurs émotions, à communiquer efficacement avec leurs enfants et à construire une relation basée sur le respect mutuel.

Cependant, interdire formellement le cri pose un dilemme. L’émotion est humaine, et la parentalité, un exercice exigeant et parfois éprouvant. Le cri peut être une manifestation instinctive de frustration, de fatigue ou d’impuissance face à certaines situations. Le défi réside donc moins dans l’interdiction pure et simple, que dans la promotion d’une parentalité consciente, qui intègre la gestion des émotions et la recherche de solutions alternatives au cri. Il s’agit d’un cheminement, d’un apprentissage continu, loin de la perfection inaccessible, mais vers une relation parent-enfant plus harmonieuse et plus respectueuse.

En conclusion, la question « a-t-on le droit de crier ? » n’a pas de réponse simple. La loi ne l’interdit pas directement, mais protège l’enfant des atteintes à sa santé mentale. Le débat se situe sur le terrain de l’éducation et de la responsabilité parentale, appelant à une réflexion profonde sur les pratiques éducatives et l’importance de privilégier la bienveillance et le dialogue. La campagne de sensibilisation, en ce sens, est une initiative louable pour accompagner les parents dans cette difficile mais essentielle mission.