Quel pays a inventé le kebab ?

L’énigme du Kebab : Une invention turque, mais une histoire complexe

Le kebab, ce met savoureux omniprésent dans nos rues et nos assiettes, est souvent perçu comme un plat cosmopolite, dénué d’une origine précise. Pourtant, l’ancêtre du kebab moderne semble bien pointer du doigt un lieu et une époque précis : Istanbul, vers 1850, au sein de l’Empire ottoman. Bien sûr, affirmer catégoriquement “la Turquie a inventé le kebab” serait une simplification excessive, car l’histoire culinaire est rarement linéaire. Il est plus juste de parler d’une convergence de pratiques culinaires qui ont donné naissance au kebab tel que nous le connaissons aujourd’hui.

Les récits de voyageurs européens du XIXe siècle constituent des témoignages précieux. Ces descriptions détaillées de la cuisson verticale de la viande, sur des brochettes plantées dans la terre ou dans des dispositifs rudimentaires, pointent vers Istanbul comme un épicentre de cette technique. Le mot “kebap” (ou “kebab”), lui-même d’origine turque, renforce cette hypothèse. L’usage de ce terme, attesté à cette époque, témoigne de l’existence d’une pratique culinaire identifiée et nommée, préfigurant les kebabs modernes.

Cependant, l’affirmation d’une pure invention turque doit être nuancée. La cuisson de viande sur des brochettes est une pratique ancienne, répandue dans de nombreuses cultures à travers le monde et à travers les âges. Des civilisations antiques, de la Grèce à la Perse, utilisaient déjà des techniques similaires. Il est donc plus pertinent de considérer le kebab turc du XIXe siècle comme une évolution, une sophistication de ces techniques ancestrales. L’invention turque réside peut-être moins dans la cuisson à la broche elle-même, que dans la combinaison spécifique d’éléments : la méthode de cuisson verticale, l’utilisation de viandes spécifiques, les marinades et les sauces qui ont progressivement façonné le plat.

Istanbul, à cette période charnière, jouait un rôle crucial. En tant que capitale d’un empire vaste et cosmopolite, elle était un lieu d’échanges culturels intenses. Ce brassage d’influences et d’innovations culinaires a indéniablement contribué à la formation d’un plat identifiable et distinct. Le kebab, tel que nous le connaissons, est donc le fruit d’une longue histoire, d’une convergence de traditions culinaires, avec pour point de convergence essentiel, l’Istanbul du milieu du XIXe siècle. Il ne s’agit pas d’une invention “ex nihilo”, mais d’une création originale, le résultat d’un processus d’évolution et d’adaptation, ancré dans la riche histoire culinaire de la Turquie.